Jules le montreur d'ours, Gaspard le berger, Alma l'éthologue , arpenteurs infatigables se font témoins, veilleurs et passeurs de notre rapport à la montagne et au sauvage, dans un magnifique roman choral, habité, périlleux et sensible
Rappelez vous votre vie effrontée
Que d’émotions dès la lecture du premier chapitre ! Que de beauté et de mélancolie…
Au crépuscule de sa vie, John, professeur de littérature, expert reconnu de l’œuvre de Shakespeare, végète dans la maison de retraite où sa quatrième femme a été contrainte de le placer. Alors que sa mémoire se délite par lambeaux entiers, effaçant jusqu’à sa fille Miranda et leur relation houleuse, les vers du Barde subsistent et tissent une trame de fond à l’histoire de sa vie.
C’est avec toujours autant de finesse et de subtilité que Jean Hegland nous offre un hommage aux liens familiaux et à la littérature et à la poésie, qui font ressortir ce qu’il y a de plus humain en nous, jusqu’à nous sauver.
Rita est arrivée dans un nouveau lycée et y a rencontré de vrais amis. Pourtant son drame est inavouable. Chacun regrette de n'avoir rien vu.
L'écriture de Marie Pavlenko nous plonge au coeur d'un groupe d'ados, décrit les émotions, les amitiés, les premières fois, avec réalisme et tendresse.
A travers le portrait de ses amis, de son amoureux, on a peur pour Rita, on imagine le pire au coeur des inégalités, de la misère sociale et du poids du silence...
Un livre qui se dévore tant on a besoin de savoir, de comprendre.
Le point de départ de ce roman est une histoire vraie : celle du naufrage d'une flotille ibérique sur les côtes médocaines vers 1626. Deux magnifiques caraques chargées de soieries, de bois précieux et de bien d'autres richesses. Il n'en fallait pas plus pour que Yan lespoux laisse vagabonder son imaginaire d'écrivain, afin de construire autour de ce désastre une fiction enthousiasmante, servie par un réalisme méticuleux et un souffle romanesque devenu trop rare.
Au coeur de ce XVIIe siècle tumultueux, émaillé par les conflits entre les grandes puissances coloniales, il fait le choix d'une narration à hauteur d'homme, en créant trois personnages aux destins contrariés : Marie, une jeune femme contrainte de vivre cachée pour échapper aux autorités bordelaises, Fernando, marin et soldat portugais qui deviendra renégat, et Diogo, orphelin engagé dans la guérilla portugaise, qui tente de reprendre Salvador de Bahia aux Hollandais. Trois personnages qui n'auraient jamais du se croiser, mais dont les aventures vont finir par converger.
Yan Lespoux résussit pleinement son pari littéraire : déjà nouvelliste talentueux et reconnu, il entre sans complexe dans la cour des romanciers, en composant une oeuvre captivante, qui ravira sans nul doute de nombreux lecteurs sur cette fin d'année 2023.
Dans une cellule de prison chilienne, une bande de détenus décide de s'évader en creusant un tunnel. Mais en passant à l'acte, ils tombent – littéralement – sur un os ! Plus précisément un rarissime squelette d'Hadrosaurus, qu'ils décident d'extraire dans le plus grand secret. Fascinés par leur découverte, ce petit groupe de criminels commence à se passionner pour ce dinosaure, répendant comme une trainée de poudre, dans toute la prison, un enthousiasme croissant pour la paléontologie ! Mais cette intrigue - délicieusement farfelue - ne doit pas occulter d'autres aspects remarquables du roman, à commencer par ses personnages soigneusement élaborés, chacun tiraillés par leurs démons, leur passé, ou par les affres d'une la vie carcérale intelligemment exploitée. Ajoutez à cela une reflexion discrète, mais pertinente, sur la liberté et la curiosité intellectuelle, et vous obtenez un texte subtil est inventif, capable de réjouir tous les profils de lecteurs !
On ne compte plus les oeuvres qui parlent de la guerre. Cette profusion de romans, d'essais, d'oeuvre cinématographiques ou de documentaires rend d'autant plus difficile la création d'une approche originale. Mais ce défi est pourtant pleinement relevé par Jeong Ji-Hun, qui a su multiplier les choix judicieux pour impacter ses lecteurs : des scènes d'une grande puissance visuelle, des dessins hypnotiques qui transcrivent à merveille le surgissement des émotions ou leur totale absence, un usage méticuleux du texte, qui transforme chaque silence en instant signifiant. Ne pas trop en dire, de peur de tout gâcher. C'est en préservant ce fil fragile que la narration progresse. La guerre éclate, mais rien ne nous est dit sur elle. Rien ne change d'une guerre à l'autre : la violence, la souffrance, et des cadavres, invariablement. Un jeune garçon est sauvé par sa mère, mais cette dernière ne survivra pas. L'enfant se retrouve seul, au milieu des cadavres, alors il se met en marche. En chemin il rencontrera une jeune fille. Tout se joue en un seul regard : il feront route ensemble, vers l'horizon...
Une oeuvre inoubliable à lire absolument.
L'histoire vraie et terrible d'une époque pas si lointaine où la France mettait des enfants en prison.
Dans la colonie pénitentiaire de Belle-île (restée active jusqu'en 1977) on enfermait toute la "mauvaise graîne" du pays. Entre les murs de cette "prison" pour mineurs, règnent les brimades, les humiliations, la violence. C'est la loi du plus fort qui s'applique, du côté des adolescents, mais le plus souvent aussi du côté de l'administration, des surveillants, des matons, qui exercent une violence constante.
Mais un soir d'orage, 56 colons parviennent à s'évader : fuir cet enfer, goûter enfin à cette liberté tant désirée... Mais pour aller où? Délivrés des murs de la colonie, ils n'en restent pas moins prisonniers d'une île cernée par l'océan. Les habitants s'improvisent chasseurs de prime - galvanisés par la promesse des 20 francs de récompense versés pour chaque enfant capturé – mais plus encore par la joie malsaine de libérer leur sauvagerie. Durant cette nuit terrible, tous les enfants sont rattrapés et reconduis en cellule.
Tous sauf un...
Avec la justesse qui caractérise si bien son écriture, Sorj Chalandon explore les méandres d'une enfance brisée, mais s'attarde surtout sur la reconstruction de son héros. Entre la peur et l'espoir, la rage et la tendresse, il forge une narration clairvoyante, à mi-chemin entre roman social et récit initiatique.
Le décor : une île touristique au large de la France, qui n'est pas nommée mais qui pourrait être Ré ou Noirmoutier. Les personnages : des gens comme vous et moi, aussi caricaturaux que les vrais humains peuvent l'être parfois. L’enjeu central : la fresque de la salle des fêtes que le narrateur est chargé de réaliser. Le tout donne une comédie sociale pince-sans-rire qui réussit à être moqueuse sans jamais être méchante, avec ce qu’il faut d’autodérision, qui offre une lecture jamais prévisible, légère et drôle !
Charlie, journaliste, alcoolique, shooté au Valium pour calmer ses angoisses, va traverser le Cambodge à la recherche du fils d’Anton, un tenancier de bar drogué à la “Ice”.
Les deux compères seront accompagné de James qui est le seul à parler correctement le Kmer, et Sam, une sublime noire manchote.
Le road-movie est un hommage vibrant à Hunter S.Thompson, il est plusieurs fois nommé dans le livre, et en effet, tous les ingrédients y sont, la daube, le speed, l’alcool, les crises d’angoisses paranoïaques, les descentes trop rapides, les chutes dans les caniveaux pour finir les nuits, les gueules de bois carabinées.
Le ton décalé et l’humour sont souvent présent dans un langage parfois fleuri.
Mais parler que de paradis artificiels, de bar à putes et de nuits sous amphétamines serait réducteur, ce livre à aussi un côté sombre, tout comme sa couverture et son titre, “perdre”.
Les chapitres sont entrecoupés de petit textes en italique ou Charlie décrit certaines de ses missions en tant que reporter de guerre dont voici un extrait :
“Rachel prend des photos du jeune homme, qui n’arrête pas de faire des signes de victoire, le “V” avec les doigts, et répète que Bachar va payer pour ses crimes, que rien ne peut arrêter la révolution.
J’ai envie de l’attraper et de le secouer, lui hurler à la gueule qu’il lui manque son bras droit, que ses deux jambes sont en morceaux, qu’il ne se battra plus jamais, que de toute façons la révolution qu’il aime tant n’est plus qu’un bordel innommable d’islamistes se battant contre des rebelles qui se battent contre des Kurdes qui se battent contre un gouvernement soutenu par les Russes. Mais je ferme ma gueule, je hoche la tête.”
Ces textes nous font comprendre sa culpabilité, son mal être, ses nuits emplis de cauchemars, de corps mutilés, et le besoin de ne plus être conscient du monde qui l’entoure.
Ce livre est un joli tour de force qui nous emmène dans une histoire rocambolesque, tout en nous réveillant des phases psychotiques pour nous rappeler que nous vivons sur une planète gérée par des fous.
La fin de l'année scolaire approche. L'occasion pour un groupe de collégiens de se lancer dans une aventure digne du petit club de détective qu'ils viennent de créer. Bien plus qu'un simple jeu, ils souhaitent retrouver la trace d'une de leur camarade portée disparue depuis deux ans. Faute de preuves, la police a décidé d'abandonner l'enquête, qui comporte pourtant de nombreuses zones d'ombre. Mais nos jeunes héros ont une piste, et ils ne sont d'ailleurs pas seuls à vouloir faire la lumière sur cette affaire...
Exploitant parfaitement les ressorts d'une narration menée à hauteur d'enfants, Chasse au cadavre fascine surtout par la densité de son atmosphère, et par cette capacité à faire surgir l'angoisse en quelques cases. Si l'on démarre sur une ambiance de camaraderie proche des Goonies ou du Stand by me de Rob Reiner, le récit bascule habilement vers un thriller extrêmement pénétrant, servi par le dessin raffiné de Hosui Yamazaki. Une grande maîtrise se dégage de l'ensemble, et consacre ce premier tome comme l'une des séries les plus enthousiasmantes de l'année 2023.
Une jeune fille, sans filtres, entière, avec des passions précises comme lire le roman “Le diable à Cristoforo”, ou manger des Dragibus, ou encore maltraiter son pauvre amant Léo et se laisser caresser par lui quand il joue aux jeux vidéos.
Une jeune fille étonnante, déstabilisante, surtout lorsqu’il s’agit de sa relation avec son frère qu’elle considère comme un être sublime, d’une beauté rare, et qui attire beaucoup de jeune filles, des “possibelles”, et elles feront l’objet d’une attention particulière, d’une obsession pour s’assurer qu’elles sont bien dignes de son frère qui est un être solaire à ses yeux.
Suivre son parcours, être dans sa tête, dans son corps, dans ses odeurs est addictif, à chaque page on se demande jusqu’où ira cette jeune fille étrange, d’un corps hors norme, qui se voit laide, qui ne vit que pour assouvir ses passions, son bien être, et protéger sa relation avec son frère.
Les sublimes descriptions de la nature autour du chalet, du spa, lieu de refuge de la sœur et du frère, contrebalance avec la description de la ville, grise, triste où on sent la jeune fille moins à l’aise, plus en danger, où la cohabitation avec son frère est plus tendu.
En marge d’une société ou l’on existe que par rapport à une image, un comportement qui ne doit pas choquer le bien être, la bienséance de ses concitoyens, cette jeune fille originale en est attachante, rafraichissante, même si parfois elle peut devenir inquiétante, voire dérangeante, mais ça ne fait qu’ajouter du charme à ce roman qui laisse une trace indélébile une fois terminé.
Parce qu'il n'ya pas de petit acte de résistance, Dona Alberti est une grande. Oui, elle est âgée, oui, elle est dépendante, oui, elle est fragile. Mais sa clairvoyance, son intelligence, sa force de caractère, son empathie, son amour de la vie, donnent à ce livre une force consolatrice allant au delà des maux et des mots. Qu'on aimerait la serrer dans ses bras cette héroîne du qutidien et lui dire merci de ce qu'elle nous enseigne, nous procure, nous inspire: rester debout , toujours.
Un squelette retrouvé aux abords de l’Hôpital Royal Victoria.
Seule certitude, il s’agit d’une femme.
Des questions vont rester sans réponses, mais il est décidé de la nommer Victoria afin de lui donner une existence, que son nom soit dit.
Le récit va nous emmener dans des portraits de différentes Victoria, tel un kaléidoscope féminin.
Toutes ces femmes ont en commun une force qui les guide pour changer de vie, se trouver, être une flèche se dirigeant vers le nord.
Des visages et des existences qui vont du deuil de la perte d’un enfant, devenir une femme dirigeante dans un monde d’hommes, être une déesse ou encore une voyageuse dans le temps.
Pas de misérabilisme ou de pathos dans ces portraits féminins décrits dans des nouvelles rythmant le récit de façon ingénieuse, sans perdre le fil narratif du roman.
Fascinant.
Laurent Binet s'empare avec brio d'un genre, celui du polar, sous une forme peu commune , le roman épistolaire.
Nous voilà donc à la recherche du meurtrier d'un peintre, 20 personnages (réels) commentent cet événement tragique qui s'est déroulé à Florence à la fin du XVIe siècle.
De lettres en lettres, Binet nous montre tout son savoir faire, entre exactitudes historique et artistique il joue avec les codes pour notre plus grand plaisir de lecteur.
Un roman intelligent, jubilatoire et original !
Dans l'Acre, région partiellement couverte par la forêt amazonienne, la situation judiciaire est inquiétante : non seulement la domination de l'homme blanc pèse encore trop sur la population indigène (provoquant une inégalité évidente) mais est aussi accusée (à juste titre) de fabriquer des assassins en acquittant des hommes coupables de féminicide.
Un cabinet d'avocats envoie une jeune recrue pour couvrir une campagne de procès sur le sujet afin d'obtenir des statistiques fiables. En plus de l'importance de cette mission pour laquelle elle se sent dévouée, c'est un bon moyen de fuir son conjoint qui l'a giflée pour la première fois.
À quel moment une femme devient-elle victime de l'homme ? Si ce qui lui est arrivé n'est rien comparé à ce qu'elle va découvrir (meurtres et viols perpétués par des maris, des amants, des pères, des frères), elle sait que ce n'est qu'un début. Nait alors un sentiment de peur et de révolte face à cette société qui trouve des circonstances atténuantes aux coupables, soudoie les membres du jury ou achète les témoins.
En parallèle, elle s'autorise à accomplir un ancien rite indigène à base de plantes hallucinogènes au cœur de la forêt. De vision en vision, elle retrouve son passé oublié et comprend pourquoi ce combat pour les femmes est si important pour elle.
"Celle qu'on tue" est l'une de ces lectures essentielles qui secoue l'âme toute entière sous les mots percutants de son autrice profondément engagée pour la cause des femmes. Il propose de nous unir, de ne plus faire partie des victimes, de se dresser ensemble et une fois pour toute contre les hommes violents, meurtriers. Car ne l'oublions pas : cette situation est réelle.
Quand Ortie, jeune sorcière de 15 ans, regarde en arrière, elle peut sans peine retrouver le moment de sa vie où tout a basculé. L’instant T avec un grand T comme TOUT PART DE LA. C’est l’histoire qu’elle va nous raconter.
Une histoire de Magie. Moderne et inventive, de magie vivante et rigolote, intime et puissante. Une histoire de magie comme on n’en en a encore jamais lue Premier tome d’un dyptique à partir de 14-15 ans, Mille Pertuis est un petit bijou à lire sans hâte, pour savourer les mots de Julia Thévenot, sa langue fantaisiste et envoûtante.
« « Pertuis, en ancien français, ça veut dire « passage », expliqua Tante Viv. Quand tu la portes à la lumière…regarde. Elle semble percée de mille petits trous, qui laissent passer le soleil.
Avec un doux sourire, elle piqua la fleur dans le chignon d’Ortie.
C’est ainsi que l’on passe d’ici à ailleurs. Par les mille pertuis de ce monde… »
Direction l'Ohio au 19 ème siècle pour une chevauchée à bride abattue au temps des grandes inventions, avec en toile de fond l'immensité de la nature sauvage américaine. Un grand roman d'aventures aux allures de western où l'on s'attache dès les premières pages à Silas, adolescent déterminé à retrouver son père enlevé par des hors-la-loi avec l'aide d'un marshal et surtout de son inséparable ami imaginaire Mittenwool. Une odyssée à l'image de celle de Télémaque (souvent cité) et le récit intime d'un enfant face au monde, uni par un lien magique avec son cheval. Rebondissements et émotions assurés jusqu'au dénouement bouleversant.
A partir de 11 ans
Il y aura un avant et un après pour Abi, victime d'un accident qui lui fait perdre un bras. Mais le roman dessine un parcours de reconstruction extrêmement pudique et lumineux. Magnifique. Pour les 15 ans et +
John c’est LE berger incontournable de cette rentrée! On l’adore ce jeune pâtre solitaire et taiseux du Haut Jura, légèrement décalé de son époque et dont la vie va basculer le jour où il apprend qu’un de ses anciens camarades de lycée a commis un meurtre.
Des paysages superbes, des pages au parfum de résineux, un personnage totalement craquant…Bref plus qu’un coup de cœur, un véritable coup de foudre aussi pour Pierric Bailly dont le roman de Jim nous avait déjà enchanté.
C'est plus beau là-bas serait cette injonction que nous nous donnons, jamais satisfait de ce que vous avons au quotidien. Mais quand ce là-bas est à portée de main, courrons-nous tête baissée vers cet avenir que nous nous martelons meilleur ou bien reculons-nous face à ce trop-plein de changement ?
Que reste-t-il de nos belles paroles quand nous les mettons en relation avec la faiblesse de nos actes ?
Violaine Bérot a l'art de nous transporter dans ses textes aux sujets sociétaux sensibles, traités avec simplicité & profondeur, dans lesquels ses titres résonnent fortement avec le contenu de ses livres.
Ici, le lecteur ne peut être qu'happé par ce court roman d'une grande justesse, où l'arrivée d'un bébé imprévu va bouleverser la vie de chacun, des parents aux habitants du village en passnat par la sage-femme.
Le portrait de cet homme, surnommé "l'ours", se dessine au fil des 14 témoignages que nous lecteur découvrons.
Un portrait poignant d'un être humain en marge de notre société mênant une vie rustique, proche de la nature, dans une grotte entourée de légendes, sans déranger personnes. Et pourtant, un événement va faire resurgir son existence.