Peut-on jouir, dans un monde injuste, sans être complice de l'injustice ? La question se pose aujourd'hui alors que nos plaisirs, qu'ils soient érotiques, alimentaires ou festifs, semblent formatés par le capitalisme contemporain et butent sur des impératifs politiques nouveaux : le refus de la violence patriarcale, la préservation du vivant, les exigences sanitaires. Plutôt que de céder à l'ascèse, ce livre nous invite à redécouvrir la dimension politiquement subversive du plaisir. La gauche n'a aucune raison d'abandonner l'allégresse à la pensée réactionnaire et sa défense de l'« art de vivre à la française » opposé au « moralisme progressiste ». A condition d'être partagé, le plaisir est une émotion qui inscrit dans les corps une issue positive à la catastrophe. Dans cet essai, Michaël Foessel propose de renouer avec les traditions qui articulent plaisirs et émancipation. Il montre que les expériences politiques prometteuses sont celles d'où la terreur et la honte sont absentes.
« Les douze articles ici rassemblés entrent dans la série de ce que j'appelle, pensant à Schubert, mes impromptus : des textes brefs, résolument subjectifs, écrits sur le champ et sans préparation (comme dit le Dictionnaire de Littré), qui s'adressent au grand public et sont le plus souvent, malgré l'éventuelle légèreté de l'écriture, d'une tonalité quelque peu grave ou mélancolique. C'est encore le cas dans ce recueil, et d'autant plus, s'agissant de ce dernier point, que la plupart de ces minuscules essais (pour reprendre cette fois le mot de Montaigne) portent sur des sujets en effet sombres ou douloureux : le pessimisme, le tragique, la mort des enfants, le handicap, l'agonie, le bagne, le suicide, l'euthanasie... J'ose croire qu'ils ne seront pas pour autant cause de tristesse, mais aideront plutôt à accepter, si possible joyeusement, la part, en toute vie, de deuil, de chagrin ou de détresse. C'est la joie qui est bonne, mais d'autant plus méritoire et belle qu'elle est souvent difficile. À l'exception du dernier, qui est de très loin le plus long, tous ces textes ont été (ou seront, pour deux d'entre eux) publiés ailleurs, dans des ouvrages collectifs ou à titre de préface ou postface. On trouvera en fin de volume la date et le lieu de leur publication passée ou à venir. Ils sont tous ici revus, corrigés, parfois sensiblement augmentés. Merci aux auteurs ou éditeurs qui les ont suscités ou accueillis. Quant au dernier texte, qui est inédit, il ne doit d'exister qu'aux lecteurs (et plus souvent aux lectrices) qui m'ont expressément demandé de l'écrire. Qu'ils en soient eux aussi remerciés. »
Des vertus, on ne parle plus guère. Cela ne signifie pas que nous n'en ayons plus besoin, ni ne nous autorise à y renoncer. Mieux vaut enseigner les vertus, disait Spinoza, que condamner les vices : mieux vaut la joie que la tristesse, mieux vaut l'admiration que le mépris, mieux vaut l'exemple que la honte. De la politesse à l'amour, dix-huit chapitres sur les vertus, celles qui nous manquent parfois, celles qui nous éclairent. Il ne s'agit pas de donner des leçons de morale, mais d'aider chacun à devenir son propre maître et son unique juge. Il n'y a pas de bien en soi : le bien n'existe pas, il est à faire et c'est ce qu'on appelle les vertus.
La situation est inédite. Jamais, dans l'histoire de l'humanité, nous n'avons disposé d'autant d'informations et jamais nous n'avons eu autant de temps libre pour y puiser loisir et connaissance du monde. Nos prédécesseurs en avaient rêvé : la science et la technologie libéreraient l'humanité. Mais ce rêve risque désormais de tourner au cauchemar. Le déferlement d'informations a entraîné une concurrence généralisée de toutes les idées, une dérégulation du « marché cognitif » qui a une fâcheuse conséquence : capter, souvent pour le pire, le précieux trésor de notre attention. Nos esprits subissent l'envoûtement des écrans et s'abandonnent aux mille visages de la déraison. Victime d'un pillage en règle, notre esprit est au coeur d'un enjeu dont dépend notre avenir. Ce contexte inquiétant dévoile certaines des aspirations profondes de l'humanité. L'heure de la confrontation avec notre propre nature aurait-elle sonné ? De la façon dont nous réagirons dépendront les possibilités d'échapper à ce qu'il faut bien appeler une menace civilisationnelle. C'est le récit de cet enjeu historique que propose le nouveau livre événement de Gérald Bronner.
Alors que le XIXe siècle a fait l'objet ces dernières années de nombreuses publications, il n'existait aucune tentative récente de proposer une lecture renouvelée du XXe siècle. S'interrogeant d'abord sur ses temporalités, l'ouvrage s'ouvre sur un tableau des trois grandes phases ayant scandé le siècle et se poursuit par une analyse de ses moments charnières (1917, 1945, 1968, etc.). Le siècle est ensuite envisagé au prisme de ses spatialités au travers d'essais envisageant l'empreinte spécifique qu'il a laissé dans chaque grande région d'un monde qu'il a élargi aux horizons extra-atmosphériques. Une attention particulière est accordée aux lieux qui ont cristallisé certaines des dynamiques les plus saillantes du siècle (Jérusalem, Auschwitz-Birkenau, l'Amazonie, etc.). Enfin, le siècle est abordé sous l'angle des principaux enjeux auxquels ses contemporains ont été confronté, du déchainement de la violence à la dégradation de l'environnement en passant par les mutations de la démographie, de l'économie, de la culture ou encore des religions.
L'histoire n'est pas une réalité brute, mais surtout, le récit que l'on en fait, à l'échelle individuelle comme à l'échelle des groupes et des sociétés, pour donner sens au temps, au temps vécu, au temps qui passe. Jadis, le sens était tout trouvé : il avait pour nom(s) Dieu, Salut, Providence ou, pour les plus savants, Théodicée. À l'orée du XXe siècle, la lecture religieuse n'est plus crédible, dans le contexte de déprise religieuse qui caractérise l'Occident - l'Europe au premier chef. La question du sens (« de la vie », « de l'histoire »...) en devient brûlante et douloureuse, comme en témoignent les oeuvres littéraires et philosophiques du premier XXe siècle, notamment après ce summum d'absurdité qu'aura constitué la mort de masse de la Grande Guerre. La littérature entra en crise, ainsi que la philosophie et la « pensée européenne » (Husserl). On ne peut guère comprendre le fascisme, le nazisme, le communisme, le national-traditionnalisme mais aussi le « libéralisme » et ses avatars sans prendre en compte cette dimension, essentielle, de donation et de dotation de sens - à l'existence collective comme aux existences individuelles -, sans oublier les tentatives de sauvetage catholique ni, toujours très utile, celles du complotisme. Au rebours de l'opposition abrupte entre discours et pratiques, ou de celle qui distingue histoire et métahistoire, il s'agit d'entrer de plain-pied dans l'histoire de notre temps en éclairant la façon dont nous habitons le temps en tentant de lui donner sens.
De sa naissance en 1808 à sa mort en 1873, la vie de Louis-Napoléon Bonaparte est une épopée. Fils du roi Louis et neveu de l'empereur Napoléon, son avenir semble radieux. Exilé à la chute de l'Empire, il combat pour la liberté en Italie puis tente par deux fois de prendre le pouvoir en France, mais il est condamné à l'enfermement à perpétuité. Il s'évade et rejoint Londres où il mène une vie de dandy, sans perdre ses ambitions politiques. Après la révolution de 1848, élu au suffrage universel masculin, il devient président de la République. Un an après le coup d'État de 1851, il restaure l'Empire et prend le nom de Napoléon III. De 1852 à 1870, le Second Empire marque profondément la France, l'Europe et le monde, de la Chine au Mexique. C'est une défaite militaire face à la Prusse qui marque la fin d'un règne essentiel dans notre histoire, par l'image donnée au pouvoir, la « fête impériale », et par la proposition politique originale, le césarisme, même s'il fut longtemps décrié.
Poutine a fabriqué une fausse histoire russe, définie par une essence métaphysique qui justifierait sa prétention à un leadership mondiale, en imposant à la planète entière ses valeurs profondément réactionnaires, qui gouvernent sa politique intérieure. La réactivation de la vieille dynamique impériale va bien au-delà de l'espace entourant le territoire russe : cela est la nouveauté. Le livre analyse le rapport entre répétabilité de structures anciennes et événements singuliers actuels. La dimension impériale, le patrimonialisme, la personnification du pouvoir et sa légitimité transcendée, le refus des éléments émancipateurs dans le libéralisme politique... autant de strates érodées, mais encore actives de l'histoire russe. L'auteur les expose et les met en rapport avec les propos officiels sur l'Ukraine, la guerre et l'Occident. C'est un livre d'histoire qui éclaire la densité de l'actualité et dévoile les ambitions en jeu dans cette croisade messianique.
Léopold Sédar Senghor eut tous les honneurs : premier Africain agrégé de grammaire, poète célébré dans le monde entier, premier président du Sénégal, académicien. Mais il fut également la cible de très nombreuses critiques : il fut en effet accusé d'essentialisme pour avoir inventé la Négritude, d'autoritarisme pour avoir fait emprisonner ses opposants, de complaisance envers la France pour n'avoir jamais rompu avec l'ancienne puissance coloniale. Difficile aujourd'hui de faire un portrait nuancé de Senghor qui affronterait véritablement le bilan politique de cet homme d'État tout en rendant justice à la grande actualité de sa pensée poétique et philosophique. C'est pourtant cette ligne de crête que cette biographie entend emprunter, loin de l'hagiographie, loin des anathèmes.
La relation entre Beauvoir et Sartre mérite d'être réexaminée. Un moment décisif de leur histoire est déclenché par Mai 68, qui les incite à modifier leur rapport à la politique. Ils se font militants, lui maoïste, elle féministe, et participent activement à l'élaboration de la politique à laquelle ils adhèrent. Ils ne se contentent plus de supporter une politique définie en dehors d'eux, comme lorsqu'ils se sont revendiqués « compagnons de route » du Parti communiste ou ont soutenu la lutte de libération nationale des Algériens. Mais leur engagement politique les amène à emprunter ou tracer des chemins distincts : si Sartre est évidemment favorable à la lutte des femmes, il ne peut cependant aller jusqu'à lui reconnaître une pleine autonomie et la retient dans l'orbite de la révolution socialiste. Leur désaccord révèle tout l'enjeu du débat qui implique le féminisme (matérialiste) et le marxisme.
« Philosopher, c'est penser sa vie et vivre sa pensée. Entre les deux un décalage subsiste pourtant, qui nous constitue et nous déchire... A quoi bon tant penser si c'est pour vivre si peu ?... On voudrait ici essayer autre chose... une philosophie à découvert, au plus près de la vie réelle, de ses échecs, de sa fragilité, de sa perpétuelle et fugitive improvisation... C'est ce que le mot d'impromptus, emprunté à Schubert, a paru pouvoir désigner à peu près. »
Socrate est, à l'égal du Christ ou de Gandhi, l'une des figures majeures du panthéon de l'humanité. Et comme elles, il incarne une rupture par rapport à son époque, ce qui, comme elles aussi, lui coûtera la vie. Socrate est subversif. C'est cette dimension du personnage que l'auteur entend souligner. Le livre relate la dernière journée de Socrate et montre comment cette issue tragique est liée au fait que Socrate est sans cesse en décalage par rapport aux institutions, dans des domaines comme la pédérastie, la justice, le jeu démocratique, l'articulation du beau et du bon, les banquets et les convenances, la religion civique. Socrate refuse la procédure de défense en usage, Socrate s'occupe des affaires de tout le monde, Socrate est systématiquement en retard, Socrate est particulièrement laid et ne fait rien pour se faire beau... En un mot : Socrate est étrange, bizarre. C'est ce caractère atopos en grec, atypique, que le livre explore, à travers le récit de cette journée fatale et de toutes celles qui précèdent, où Socrate dit et fait des choses... inconvenantes.
Ce livre développe une conception ouverte et pragmatique de la décroissance, en commençant par rappeler que la récession ou la pandémie ne sont pas la décroissance, à savoir une société équitable et résiliente. L'ouvrage met en lumière les coûts exorbitants de la croissance. Avec un taux de croissance moyen de 3 %, le volume de l'économie serait à la fin du siècle onze fois ce qu'il représente aujourd'hui ; autant dire qu'il ne resterait pas grand-chose de l'habitabilité de la Terre en cours de réduction. Des expériences, des institutions et des politiques publiques s'affranchissent d'ores et déjà de la croissance. Ce livre propose aussi des solutions comme un New Deal vert, le partage des emplois, la diminution du temps de travail (tout en gardant à l'esprit le surcroît de travail qui devrait découler de la décrue énergétique), un revenu minimum garanti lié au Care, les taxes sur les plus hauts revenus, mais aussi la consommation ou l'usage des ressources naturelles, ou encore le soutien à l'économie collaborative.
Comment devrions-nous parler de sexe ? Du nôtre et de celui que l'on pratique ; un acte prétendument privé chargé de sens public ; une préférence personnelle façonnée par des forces extérieures ; un lieu où le plaisir et l'éthique peuvent se dissocier sauvagement. Depuis le mouvement #MeToo, beaucoup se sont attachés à la question du consentement comme cadre clé pour parvenir à la justice sexuelle. Pourtant, le consentement est un outil insuffisant. Pour appréhender le sexe dans toute sa complexité - ses ambivalences profondes, son rapport au genre, à la classe, à la race et au pouvoir - l'autrice souligne la nécessité d'aller au-delà du « oui et non », de l'acte voulu et du non désiré et interroge les relations tendues entre discrimination et préférence, pornographie et liberté, viol et injustice raciale, punition et responsabilité, plaisir et pouvoir, capitalisme et libération. Ainsi, elle repense le sexe en tant que phénomène politique. Incisif et très original, Le Droit au sexe est un examen historique de la politique et de l'éthique du sexe dans ce monde, animé par l'espoir d'une autre sexualité possible.
À travers l'étude du sacrifice, Hubert et Mauss s'intéressent au sacré et au rapport au sacré, dont l'étude ouvre une fenêtre sur la nature de la société puisque les choses sacrées sont choses sociales. À partir de l'idée de l'unité générique du sacrifice qui repose sur le postulat de l'unité du genre humain, la démarche suppose de s'intéresser à toutes les formes de sacrifices rituels pour en tirer le schème général ou type idéal. Ce parti pris méthodologique comparatiste, issu de l'école durkheimienne, fait toute l'originalité de l'essai à son époque et sa pertinence de nos jours, évitant les spéculations généalogiques qui établiraient l'antériorité d'une forme sur une autre. Ce texte classique permet de formuler une série de questions toujours actuelles pour l'ethnographie.
La Poétique de l'espace explore, à travers les images littéraires, la dimension imaginaire de notre relation à l'espace, en se focalisant sur les espaces du bonheur intime. Le « philosophe-poète » que fût Gaston Bachelard entend ainsi aider ses lecteurs à mieux habiter le monde, grâce aux puissances de l'imagination et, plus précisément, de la rêverie. Aussi l'ouvrage propose-t-il tout d'abord une suite de variations poético-philosophiques sur le thème fondamental de la Maison, de celle de l'être humain aux « maisons animales » comme la coquille ou le nid, en passant par ces « maisons des choses » que sont les tiroirs, les armoires et les coffres. Il ouvre de la sorte une ample réflexion sur l'art d'habiter le monde, impliquant une dialectique de la miniature et de l'immensité, puis du dedans et du dehors, qui s'achève par une méditation des images de la plénitude heureuse, condensant les enjeux anthropologiques, métaphysiques et éthiques de cette oeuvre sans précédent.
« J'aime les définitions. J'y vois davantage qu'un jeu ou qu'un exercice intellectuel : une exigence de la pensée. Pour ne pas se perdre dans la forêt des mots et des idées. Pour trouver son chemin, toujours singulier, vers l'universel. La philosophie a son vocabulaire propre : certains mots qui n'appartiennent qu'à elle, d'autres, plus nombreux, qu'elle emprunte au langage ordinaire, auxquels elle donne un sens plus précis ou plus profond. Cela fait une partie de sa difficulté comme de sa force. Un jargon ? Seulement pour ceux qui ne le connaissent pas ou qui s'en servent mal. Voltaire, à qui j'emprunte mon titre, a su montrer que la clarté, contre la folie des hommes, était plus efficace qu'un discours sibyllin ou abscons. Comment combattre l'obscurantisme par l'obscurité ? La peur, par le terrorisme ? La bêtise, par le snobisme ? Mieux vaut s'adresser à tous, pour aider chacun à penser. La philosophie n'appartient à personne. Qu'elle demande des efforts, du travail, de la réflexion, c'est une évidence. Mais elle ne vaut que par le plaisir qu'elle offre : celui de penser mieux, pour vivre mieux. C'est à quoi ces 2 267 définitions voudraient contribuer." Nouvelle édition intégralement revue et augmentée de 613 nouvelles entrées.
Cléopâtre, dernière reine d'Égypte (69-30 av. J.-C.), est une exception dans l'histoire de l'humanité : elle est l'une des rares femmes à avoir exercé le pouvoir politique. Selon les auteurs antiques, tous plus ou moins hostiles et misogynes, elle n'aurait dû ses succès qu'à son charme, aussi irrésistible que maléfique. Mais d'autres sources, notamment des monnaies, des inscriptions et des statues retrouvées en Egypte, nous montrent qu'elle fut en réalité une cheffe politique compétente. Elle mena des réformes économiques audacieuses et une politique religieuse qui la conduisit à se présenter comme une déesse vivante, à la fois grecque et égyptienne. Finalement vaincue, Cléopâtre se suicide pour échapper à une captivité humiliante. C'est alors que débute son fabuleux destin posthume qui, en passant par tous les arts, la conduisit d'Alexandrie jusqu'à Hollywood, où elle fut successivement incarnée par une série d'actrices sulfureuses, Theda Bara, Claudette Colbert et Elizabeth Taylor, qui déclenchèrent un phénomène d'engouement planétaire pour Cléopâtre, devenue une figure essentielle du star system et de la culture populaire.
En dépit ou à cause de son persistant succès public, la géopolitique demeure une discipline aux contours flous, à tel point qu'il semble en exister autant de définitions que de praticiens. L'ouvrage montre que cette indétermination n'est pas nouvelle et plonge ses racines dans l'histoire même de la discipline : depuis ses origines, elle fait l'objet de controverses et de définitions concurrentes. En revenant sur les principaux débats suscités par la démarche géopolitique et sur les différentes conceptions qui en ont été proposées, Florian Louis tente d'en saisir l'originalité et la pertinence non sans en pointer les limites. Il permet ainsi de saisir ce qui fait la spécificité d'une approche géopolitique et constitue une utile introduction à la discipline.
Elles ne furent ni héroïnes, ni puissantes mais elles savaient toutes ce qu'elles voulaient : ne pas se conformer à ce qu'on attendait d'elle ! Arlette Camion brosse le portrait de dix femmes très différentes mais unies dans une résistance discrète et tenace. À travers plus d'un millénaire, de 500 à 1600, d'Amalasonthe, fille de Théodoric le Grand, à Sofonisba Anguissola, première femme peintre célèbre, les stratégies diffèrent, mais le projet est le même. Si elles n'ont pas pu imposer définitivement le règne de la douceur et de la paix, elles ont réussi à ne pas obéir à l'ordre établi, celui de la violence et de la bêtise. Adoptant le parti de l'humour, voici une traversée moqueuse de onze siècles d'histoire européenne, aussi éclairante que divertissante.
« Exister dans le système, c'est souvent être assis derrière des vitres, face à un écran. » Des forces nouvelles, mixtes de technique, d'économique et de numérique, ont fait leur apparition. D'une puissance hors norme, ces ultraforces modifient nos systèmes et les fragilisent, produisant le rejet du système, quand ce n'est pas la maladie ou la misère. Ce qui émerge alors est une surenchère entre un système fragilisé et des ultraforces décomplexées. Nous assistons à ses premiers effets : simplisme politique, approfondissement des inégalités, règne de multinationales dominant les États.Face à ces questions, le livre propose une philosophie concrète du système (centrée sur le verre, les chaises et les écrans) et des ultraforces qui en dessinent le cours. Il ouvre la voie à la construction d'un soi plus authentique, moins déterminé par ce qui l'entoure. Comment être soi à l'ère des ultraforces, avec leur cortège de simplicité et de brutalité ?
Contrairement à ce que le titre a souvent pu laisser penser, il ne s'agit pas d'un livre sur les enfants surdoués. On y trouvera par contre une recherche autour de l'interrogation : pourquoi tant d'adultes doués, qui réussissent dans la vie, souffrent-ils de se sentir étrangers à eux-mêmes, intérieurement vides ? Depuis la première parution de ce livre en 1979, les réponses d'Alice Miller à cette question ont aidé de nombreux lecteurs à trouver un accès à leur propre histoire et à découvrir que la partie précieuse de leur Soi leur était restée cachée jusqu'alors (leur « drame »). Ses lecteurs sont encouragés à chercher les raisons de leur souffrance actuelle dans leur histoire, l'histoire du petit enfant qui ne devait vivre que pour les besoins de ses parents en ignorant ou niant ses propres besoins. Au lieu de payer plus tard avec des dépressions et de nombreuses maladies corporelles pour cette auto-mutilation, l'adulte peut s'en libérer en trouvant l'empathie pour l'enfant qu'il a été et pour sa souffrance muette. Aussitôt qu'il assume sa vérité, bloquée si longtemps dans son corps, il peut commencer à regagner, pas à pas, sa vitalité, la vie authentique qu'il n'avait pas osé vivre.La perception par l'auteur du vécu réel de l'enfant n'est plus en lien avec celle de la psychanalyse, à laquelle Alice Miller reproche de rester dans la vieille tradition qui accuse les enfants et protège les parents, autant dans la théorie que dans la pratique où les rapports des traumatismes réels sont interprétés comme fantasmes.
Vous est-il arrivé de douter de la réalité du monde autour de vous ? Avez-vous déjà été hanté par certains indices troublants, par une sensation d'hallucination généralisée, par une impression tenace de mystification ? N'avez-vous jamais pensé que votre vie entière n'était qu'illusion, contrefaçon et même imposture ? Peut-être aviez-vous raison : il faudrait alors vous résoudre à vivre dans un monde factice. De Gabriel Tarde à Maurice Renard, de H. G. Wells à Philip K. Dick, David Cronenberg ou Ted Chiang, une riche lignée d'écrivains et de cinéastes a été obsédée par ce sentiment diffus d'irréalité. Ils ont, dans leurs récits, imaginé puis fait l'expérience d'une multitude de mondes faux, dans lesquels on croise, avec jubilation et inquiétude, des humains réduits à l'état de cobayes par des extraterrestres, des scientifiques fabriquant des simulacres d'univers ou des dieux défaillants infiltrant la psyché malade de leurs fidèles. En inventant ces mondes factices, souvent effrayants, toujours fantasques, écrivains et cinéastes sont devenus philosophes, et plus précisément métaphysiciens. Ils nous ont révélé un abîme sous nos rassurantes certitudes : une manière étrange et nouvelle de voir, de sentir et de penser le monde.
La mer est notre ressource pour respirer, pour nous nourrir, mais aussi pour rêver. Elle fait partie de notre environnement tout en constituant un autre monde, aussi effrayant qu'évocateur, un ailleurs radical. Cette altérité permet à Roberto Casati de la repenser dans une perspective inédite, de comprendre à quel point elle a fait de nous ce que nous sommes et ce que nous sommes appelés à devenir. Traversant l'océan à bord d'un voilier en marin-philosophe, il embarque le lecteur pour un véritable voyage initiatique. Naviguer dans un espace de liberté qui semble sans limite change radicalement le rapport à l'environnement, aux personnes et même aux objets. Le bateau devient alors une école de vie qui oblige à tout repenser pour agir autrement. La navigation donne vie à une forme de savoir actif, construit par l'action : une philosophie de l'océan.