"Ecrire, c'est voler."
Amélie Nothomb
« En 1977, alors que je travaillais à Libération, j'ai lu que le Centre d'éducation surveillée de Belle-Île-en-Mer allait être fermé. Ce mot désignait en fait une colonie pénitentiaire pour mineurs. Entre ses hauts murs, où avaient d'abord été détenus des Communards, ont été « rééduqués » à partir de 1880 les petits voyous des villes, les brigands des campagnes mais aussi des cancres turbulents, des gamins abandonnés et des orphelins. Les plus jeunes avaient 12 ans.
Le soir du 27 août 1934, cinquante-six gamins se sont révoltés et ont fait le mur. Tandis que les fuyards étaient cernés par la mer, les gendarmes offraient une pièce de vingt francs pour chaque enfant capturé. Alors, les braves gens se sont mis en chasse et ont traqué les fugitifs dans les villages, sur les plages, dans les grottes. Tous ont été capturés.Tous ? Non : aux premières lueurs de l'aube, un évadé manquait à l'appel.
Je me suis glissé dans sa peau et c'est son histoire que je raconte. Celle d'un enfant battu qui me ressemble. La métamorphose d'un fauve né sans amour, d'un enragé, obligé de desserrer les poings pour saisir les mains tendues. » S.C.
« Cher connard,
J'ai lu ce que tu as publié sur ton compte Insta. Tu es comme un pigeon qui m'aurait chié sur l'épaule en passant. C'est salissant, et très désagréable. Ouin ouin ouin je suis une petite baltringue qui n'intéresse personne et je couine comme un chihuahua parce que je rêve qu'on me remarque. Gloire aux réseaux sociaux : tu l'as eu, ton quart d'heure de gloire. La preuve : je t'écris. »
Après le triomphe de sa trilogie Vernon Subutex, le grand retour de Virginie Despentes avec ces Liaisons dangereuses ultra-contemporaines.
Roman de rage et de consolation, de colère et d'acceptation, où l'amitié se révèle plus forte que les faiblesses humaines...
« On va faire un beau film ! »
Depuis que le producteur a validé ainsi son scénario, Boris est aux anges. La magnifique tragédie amoureuse qu'il a intitulée Les servitudes silencieuses verra le jour au cinéma, en noir et blanc, comme dans ses rêves les plus fous. Et tout semble décidément sourire à Boris quand il fait la rencontre d'Aurélie, une jeune femme cinéphile qui se passionne pour le projet. Pourtant le cinéma, comme l'amour, a ses aléas et ses contraintes. Du film d'auteur au navet, il n'y a parfois qu'un pas. Fabrice Caro développe ici son art de l'absurde dans un délicieux crescendo comique.
Avec beaucoup d'humour et d'énergie, Pascal Sangla nous emporte dans l'univers toujours aussi savoureux et drôle de Fabrice Caro.
« Pour le commerce, la guerre présente beaucoup d'avantages, même après. »
Sur les ruines du plus grand carnage du XXe siècle, deux rescapés des tranchées, passablement abîmés, prennent leur revanche en réalisant une escroquerie aussi spectaculaire qu'amorale. Des sentiers de la gloire à la subversion de la patrie victorieuse, ils vont découvrir que la France ne plaisante pas avec ses morts...
Fresque d'une rare cruauté, remarquable par son architecture et sa puissance d'évocation, Au revoir là-haut est le grand roman de l'après-guerre de 14, de l'illusion de l'armistice, de l'État qui glorifie ses disparus et se débarrasse de vivants trop encombrants, de l'abomination érigée en vertu.
Dans l'atmosphère crépusculaire des lendemains qui déchantent, peuplée de misérables pantins et de lâches reçus en héros, Pierre Lemaitre compose la grande tragédie de cette génération perdue avec un talent et une maîtrise impressionnants.
« Le 18 août 2021, j'ai passé la nuit au Musée Anne Frank, dans l'Annexe. Anne Frank, que tout le monde connaît tellement qu'il n'en sait pas grand-chose. Comment l'appeler, son célèbre journal, que tous les écoliers ont lu et dont aucun adulte ne se souvient vraiment.
Est-ce un témoignage, un testament, une oeuvre ?
Celle d'une jeune fille, qui n'aura pour tout voyage qu'un escalier à monter et à descendre, moins d'une quarantaine de mètres carrés à arpenter, sept cent soixante jours durant. La nuit, je l'imaginais semblable à un recueillement, à un silence. J'imaginais la nuit propice à accueillir l'absence d'Anne Frank. Mais je me suis trompée. La nuit s'est habitée, éclairée de reflets ; au coeur de l'Annexe, une urgence se tenait tapie encore, à retrouver. »L. L.
Le Grand Monde, le nouveau roman de Pierre Lemaitre.
Après sa remarquable fresque de l'entre-deux-guerres, il nous propose aujourd'hui une plongée mouvementée et jubilatoire dans les Trente Glorieuses.
"TU VEUX PAS ÉCRIRE UN ROMAN SÉRIEUX ?" a conseillé Lisa à Alan, avant de le quitter pour un universitaire spécialiste de Ronsard. Profitant de l'été qui commence, Alan espère donc se plonger avec la discipline d'un guerrier samouraï dans l'écriture d'un livre profond et poignant. Ça et aussi s'occuper de la piscine des voisins partis en vacances. Or bientôt l'eau du bassin se met à verdir, de drôles d'insectes appelés notonectes se multiplient à la surface...
Après Le discours, cette nouvelle comédie brosse un portrait aussi désopilant que juste de notre époque.
Un magistral roman d'apprentissage, une saisissante enquête sur les traces d'un mystérieux auteur menée par un jeune écrivain africain à Paris
Prix Transfuge du meilleur roman de langue française
En 2018, Diégane Latyr Faye, jeune écrivain sénégalais, découvre à Paris un livre mythique, paru en 1938 :
Le Labyrinthe de l'inhumain. On a perdu la trace de son auteur, qualifié en son temps de " Rimbaud nègre ", depuis le scandale que déclencha la parution de son texte. Diégane s'engage alors, fasciné, sur la piste du mystérieux T. C. Elimane, où il affronte les grandes tragédies que sont le colonialisme ou la Shoah. Du Sénégal à la France en passant par l'Argentine, quelle vérité l'attend au centre de ce labyrinthe ?
Sans jamais perdre le fil de cette quête qui l'accapare, Diégane, à Paris, fréquente un groupe de jeunes auteurs africains : tous s'observent, discutent, boivent, font beaucoup l'amour, et s'interrogent sur la nécessité de la création à partir de l'exil. Il va surtout s'attacher à deux femmes : la sulfureuse Siga, détentrice de secrets, et la fugace photojournaliste Aïda...
D'une perpétuelle inventivité,
La plus secrète mémoire des hommes est un roman étourdissant, dominé par l'exigence du choix entre l'écriture et la vie, ou encore par le désir de dépasser la question du face-à-face entre Afrique et Occident. Il est surtout un chant d'amour à la littérature et à son pouvoir intemporel.
"Il est une chose admirable qui surpasse toujours la connaissance, l'intelligence, et même le génie, c'est l'incompréhension."
En juin 2021, un événement insensé bouleverse les vies de centaines d'hommes et de femmes, tous passagers d'un vol Paris-New York. Parmi eux : Blake, père de famille respectable et néanmoins tueur à gages ; Slimboy, pop star nigériane, las de vivre dans le mensonge ; Joanna, redoutable avocate rattrapée par ses failles ; ou encore Victor Miesel, écrivain confidentiel soudain devenu culte. Tous croyaient avoir une vie secrète. Nul n'imaginait à quel point c'était vrai.
"Il semblait que la colonisation n'avait été rien d'autre qu'un malentendu, une erreur dont les Français à présent se repentaient et que les Marocains faisaient semblant d'oublier."
Maroc, 1968 : tandis que Mathilde s'occupait du foyer, Amine est parvenu à faire de son domaine aride une entreprise florissante. Ils appartiennent désormais à une bourgeoisie qui prospère, fait la fête et croit en des lendemains heureux. Mais le retour de leur fille Aïcha, partie étudier en France, fait voler en éclats le glacis d'apparence qui figeait cette famille. Le modèle d'émancipation qu'ils croyaient incarner depuis l'indépendance n'est-il qu'une illusion ?
Après Le pays des autres, Regardez-nous danser poursuit une fresque familiale vibrante d'émotions et de personnages inoubliables.
La révélation de L'Autre fille va bousculer toute l'oeuvre qu'Annie Ernaux a consacrée à son enfance depuis La Place.
" Car il a bien fallu que je me débrouille avec cette mystérieuse incohérence : toi la bonne fille, la petite sainte, tu n'as pas été sauvée, moi le démon j'étais vivante. Plus que vivante, miraculée. Il fallait donc que tu meures à six ans pour que je vienne au monde et que je sois sauvée. "
"Ici, c'est comme ça."
Cette phrase, elle l'entendrait souvent. À cet instant précis, elle comprit qu'elle était une étrangère, une femme, une épouse, un être à la merci des autres.
En 1944, Mathilde tombe amoureuse d'Amine, un Marocain venu combattre dans l'armée française. Rêvant de quitter son Alsace natale, la jeune femme s'installe avec lui à Meknès pour y fonder une famille. Mais les désillusions s'accumulent : le manque d'argent, le racisme et les humiliations fragilisent leur couple. Dans ce pays ambivalent, qui réclame une indépendance que les hommes refusent pourtant aux femmes, Mathilde réussira-t-elle à poursuivre sa quête de liberté sans heurter ceux qu'elle aime ?
1928 à Perdido. Alors que le clan Caskey se déchire dans la guerre intestine et sans merci que se livrent Mary-Love et sa belle-fille, et tandis que d'autres crises - conjugales, économiques, existentielles - aux répercussions défiant l'imagination se profilent, dans les recoins sombres de la maison d'Elinor, la plus grande de la ville, les mauvais souvenirs rôdent et tissent, implacables, leurs toiles mortelles.
Au-delà des manipulations et des rebondissements, de l'amour et de la haine, Michael McDowell (1950-1999), co-créateur des mythiques Beetlejuice et L'Étrange Noël de Monsieur Jack, et auteur d'une trentaine de livres, réussit avec Blackwater à bâtir une saga en six romans aussi addictive qu'une série Netflix, baignée d'une atmosphère unique et fascinante digne de Stephen King.
Découvrez le troisième épisode de Blackwater, une saga matriarcale teintée de surnaturel avec un soupçon d'horreur.
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Violette Toussaint est garde-cimetière dans une petite ville de Bourgogne. Les gens de passage et les habitués viennent se réchauffer dans sa loge où rires et larmes se mélangent au café qu'elle leur offre. Son quotidien est rythmé par leurs confidences. Un jour, parce qu'un homme et une femme ont décidé de reposer ensemble dans son carré de terre, tout bascule. Des liens qui unissent vivants et morts sont exhumés, et certaines âmes que l'on croyait noires, se révèlent lumineuses.Après l'émotion et le succès des Oubliés du dimanche, Valérie Perrin nous fait partager l'histoire intense d'une femme qui, malgré les épreuves, croit obstinément au bonheur. Avec ce talent si rare de rendre l'ordinaire exceptionnel, Valérie Perrin crée autour de cette fée du quotidien un monde plein de poésie et d'humanité.
Un hymne au merveilleux des choses simples.
Cette fois-ci, il s'agit d'un véritable roman policier avec une énigme, un lieu clos, des indices et des conjectures. Tout part d'un crime, et l'intrigue est entièrement tendue par l'enquête et la recherche de l'assassin.
L'action se déroule à Florence, au XVIe siècle. Le vieux peintre maniériste Pontormo a été assassiné au pied des fresques auxquelles il travaillait depuis onze ans. Un tableau a été maquillé. Un crime de lèse-majesté a été commis. Vasari, l'homme à tout faire du Duc de Florence, accessoirement considéré comme l'inventeur de l'histoire de l'art et le premier à avoir employé le mot de « Renaissance », est chargé de l'enquête.
La situation à Florence en 1557 exige doigté, discrétion, loyauté, sensibilité artistique et compréhension politique. L'Europe est une poudrière. L'Italie est le terrain où s'affrontent la France et l'Espagne, les deux grandes puissances. Le Duc de Florence, Cosimo de Médicis, doit faire face aux convoitises de la reine de France, sa cousine Catherine de Médicis, alliée à son vieil ennemi, le républicain Piero Strozzi qui écume les environs avec l'armée du Duc de Guise. La ville pullule de savonarolistes nostalgiques d'un ordre moral qui condamne les nudités de Michel-Ange et de ses disciples maniéristes. Le pape lui-même est un inquisiteur de la pire espèce, celui qui a instauré la mise à l'index des livres jugés immoraux ou dangereux.
Perspective(s) est un roman épistolaire. Ce parti-pris du roman par lettres répond à une triple motivation : la volonté de donner davantage de profondeur aux personnages d'une part (creuser leurs motivations, et, selon un mot qui symbolise toute la révolution esthétique de la Renaissance, leurs perspectives), le goût de la mécanique de précision horlogère d'autre part, enfin le défi formel que constitue le croisement de deux genres a priori peu compatibles, et dont il existe peu d'exemples.
Le roman se compose de 176 lettres, soit une de plus que les Liaisons dangereuses.
En 1992, Gabriel, dix ans, vit au Burundi avec son père français, entrepreneur, sa mère rwandaise et sa petite soeur, Ana, dans un confortable quartier d'expatriés. Gabriel passe le plus clair de son temps avec ses copains, une joyeuse bande occupée à faire les quatre cents coups. Un quotidien paisible, une enfance douce qui vont se disloquer en même temps que ce « petit pays » d'Afrique brutalement malmené par l'Histoire. Gabriel voit avec inquiétude ses parents se séparer, puis la guerre civile se profiler, suivie du drame rwandais. Le quartier est bouleversé. Par vagues successives, la violence l'envahit, l'imprègne, et tout bascule. Gabriel se croyait un enfant, il va se découvrir métis, Tutsi, Français...
« J'ai écrit ce roman pour faire surgir un monde oublié, pour dire nos instants joyeux, discrets comme des filles de bonnes familles: le parfum de citronnelle dans les rues, les promenades le soir le long des bougainvilliers, les siestes l'après-midi derrière les moustiquaires trouées, les conversations futiles, assis sur un casier de bières, les termites les jours d'orages... J'ai écrit ce roman pour crier à l'univers que nous avons existé, avec nos vies simples, notre train-train, notre ennui, que nous avions des bonheurs qui ne cherchaient qu'à le rester avant d'être expédiés aux quatre coins du monde et de devenir une bande d'exilés, de réfugiés, d'immigrés, de migrants. »
Avec un rare sens du romanesque, Gaël Faye évoque les tourments et les interrogations d'un enfant pris dans une Histoire qui le fait grandir plus vite que prévu. Nourri d'un drame que l'auteur connaît bien, un premier roman d'une ampleur exceptionnelle, parcouru d'ombres et de lumière, de tragique et d'humour, de personnages qui tentent de survivre à la tragédie.
Tandis que la ville se remet à peine d'une crue dévastatrice, le chantier d'une digue censée la protéger charrie son lot de conséquences : main d'oeuvre incontrôlable, courants capricieux, disparitions inquiétantes.
Pendant ce temps, dans le clan Caskey, Mary-Love, la matriarche, voit ses machinations se heurter à celles d'Elinor, son étrange belle-fille, mais la lutte ne fait que commencer.
Manigances, alliances contre-nature, sacrifices, tout est permis. À Perdido, les mutations seront profondes, et les conséquences, irréversibles.
Au-delà des manipulations et des rebondissements, de l'amour et de la haine, Michael McDowell (1950-1999), ¬co-créateur des mythiques Beetlejuice et L'Étrange Noël de Monsieur Jack, et auteur d'une trentaine de livres, réussit avec Blackwater à bâtir une saga en six romans aussi -addictive qu'une série Netflix, baignée d'une atmosphère unique et fascinante digne de Stephen King.
Découvrez le deuxième épisode de Blackwater, une saga matriarcale avec une touche de surnaturel et un soupçon d'horreur.
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Quelque part dans un paysage méditerranéen orageux familier et insaisissable, en marge d'un champ de bataille indéterminé, un soldat inconnu tente de fuir sa propre violence. Le 11 septembre 2001, sur la Havel, aux alentours de Berlin, à bord d'un petit paquebot de croisière, un colloque scientifique fait revivre la figure de Paul Heudeber, mathématicien est-allemand de génie, disparu tragiquement, resté fidèle à son côté du Mur de Berlin, malgré l'effondrement des idéologies.
La guerre, la désertion, l'amour et l'engagement... le nouveau roman de Mathias Enard - vif, bref, suspendu - observe ce que la guerre fait au plus intime de nos vies.
Sarah a confié l'histoire de sa vie à un écrivain qu'elle admire, afin qu'il en fasse un roman. Dans ce roman, Sarah s'appelle Susanne.
Au départ de ce récit, Susanne ne se sent plus aimée comme autrefois. Chaque soir, son mari se retire dans son bureau, la laissant seule avec leurs enfants. Dans le même temps, elle s'aperçoit qu'il possède soixante-quinze pour cent de leur domicile conjugal. Troublée, elle demande à son époux de rééquilibrer la répartition et de se montrer plus présent, en vain. Pour l'obliger à réagir, Susanne lui annonce qu'elle va vivre ailleurs quelque temps. Cette décision provoquera un enchaînement d'événements aussi bouleversants qu'imprévisibles...
Réflexion sur le lien troublant et mystérieux qui peut apparaître entre lecteurs et écrivains, ce roman puissant, porté par la beauté de son écriture, fait le portrait d'une femme qui cherche à être à sa juste place, quelque périlleux que puisse être le chemin qui y mène.
Dans ce récit intense aux voix multiples, la plume d'Eric Reinhardt est portée par l'inventivité de Laurent Stocker, dans le rôle de l'écrivain, et Yaël Elhadad qui incarne Sarah avec subtilité.
Hélène a bientôt 40 ans. Elle a fait de belles études, une carrière. Elle a réalisé le programme des magazines et le rêve de son adolescence : se tirer, changer de milieu, réussir. Et pourtant, le sentiment de gâchis est là, les années ont passé, tout a déçu.
Christophe, lui, n'a jamais quitté ce bled où ils ont grandi avec Hélène. Il n'est plus si beau. Il a fait sa vie à petits pas, priv ilégiant les copains, la teuf, remettant au lendemain les grandes décisions, l'âge des choix. On pourrait croire qu'il a tout raté. Et pourtant, il croit dur comme fer que tout est encore possible.
Connemara c'est l'histoire d'un retour au pays, d'une tentative à deux, le récit d'une autre chance et d'un amour qui se cherche par-delà les distances dans un pays qui chante Sardou et va voter contre soi.
"Il m'aura fallu courir le monde et tomber d'un toit pour saisir que je disposais là, sous mes yeux, dans un pays si proche dont j'ignorais les replis, d'un réseau de chemins campagnards ouverts sur le mystère, baignés de pur silence, miraculeusement vides.
La vie me laissait une chance, il était donc grand temps de traverser la France à pied sur mes chemins noirs.
Là, personne ne vous indique ni comment vous tenir, ni quoi penser, ni même la direction à prendre."
Sylvain Tesson.
Juillet 1937. À Home Place, au coeur du Sussex, jardiniers, femmes de chambre et cuisinière sont sur le pont. La Duche orchestre le ballet des domestiques avant l'arrivée de ses trois fils, Hugh, Edward et Rupert Cazalet, en chemin depuis Londres avec épouses, enfants et gouvernantes. Où dormira Clary, adolescente mal dans sa peau en plein conflit avec sa belle-mère ? Quelle robe portera Villy, ancienne ballerine désormais mère au foyer ? Polly, terrorisée à l'idée qu'une guerre éclate, s'entendra-t-elle avec sa cousine Louise qui rêve de devenir actrice ? Rachel, la seule fille de la Duche, trouvera-t-elle un moment pour ouvrir la précieuse lettre de son amie Sid ?
Non-dits, chamailleries, profonds chagrins... Aux préoccupations des adultes font écho les inquiétudes des enfants, et à la résilience des femmes, qu'elles soient épouses, fillettes ou domestiques, répond la toute-puissance - ou l'impuissance - des hommes. L'été regorge d'incertitudes mais, sans l'ombre d'un doute, une nouvelle guerre approche : entre pique-niques sur la plage et soirées auprès du gramophone, il faudra inventorier lits de camp et masques à gaz.
Septembre 1939. La Pologne est envahie et la famille Cazalet apprend l'entrée en guerre de l'Angleterre. À Home Place, la routine est régulièrement bousculée par les raids allemands. Louise rêve toujours de jouer Hamlet mais doit d'abord passer par une école de cuisine. Au grand dam de sa famille, elle fume, porte des pantalons, découvre la sexualité et fait ses débuts en tant qu'actrice dans un sinistre théâtre de province. Clary, dont le père, Rupert, est porté disparu sur les côtes françaises, renseigne scrupuleusement chaque parcelle de sa vie dans des carnets. Polly, inquiète de la mystérieuse maladie de sa mère, se lie d'amitié avec le cousin de Louise, Christopher, dont les discours pacifistes ont de plus en plus de mal à convaincre. Zoë, la femme de Rupert, a donné naissance à une fille et connu un profond bouleversement. Le volume se clôt sur l'attaque de Pearl Harbor : de Home Place à Londres, la guerre et la terreur d'une possible défaite ne semblent jamais très loin.