Avant que les réseaux sociaux n'en changent la donne, les cafés du coin aimantaient la vie. À Lisbonne, il semble que l'usage n'ait pas totalement disparu. En bas de chez Ianis, on se retrouve pour refaire sinon le monde dans sa globalité, tout au moins ses aspects qui ont notre faveur : le foot, Teleperformance ou le café à 70 centimes. De fait, au café du coin, on apprend la vie lisboète et de résidant étranger, on s'élève doucement vers un statut moins contraint : on s'immisce dans le rythme du quotidien au point de se débarrasser des oripeaux de l'étranger. Au café du coin, on est entre habitués, anthropologues de comptoir.
Accompagné des illustrations au trait de Laura Penez, Ianis Periac signe là, dans une langue drôle et tendre, le récit lisboète du voyage au café du coin.
Willy est une vraie plaie, toujours insatisfait, qui se comporte comme un sale gosse, avec une certaine jouissance à ne pas être du bon côté. Immigré équatorien fraîchement débarqué à Malaga, il dresse, dans une langue piquante et tranchante, un portrait décalé et grotesque de son environnement et de sa situation personnelle. Car Will écrit. Il écrit d'une voix amère, comme une logorrhée lancinante, où les scènes s'enchaînent, offrant une galerie de portraits cyniques de losers qui nous éloigne des grandes et belles histoires ou de la grande vie que l'on s'imagine pouvoir mener dans la métropole méridionale. Malaga, pas sans mon nom est une novella qui nous invite à pénétrer dans un espace où il est permis de se montrer insolent, où l'égoïsme n'est pas vu d'un mauvais oeil, et où la haine devient un besoin... Santiago Vizcaíno est un auteur équatorien. Il est ici traduit pour la première fois en français. Né à Ouito, en Equateur en 1982, Santiago Vizcaíno est titulaire d'une licence en communication et littérature, il a aussi étudié à l'université de Malaga. Ses textes ont été publiés dans de nombreuses revues et son oeuvre poétique a été plusieurs fois récompensée.
Minka Ma ferme au Japon, permet de rentrer dans la grande histoire des relations américanojaponaises et du Japon de l'après-guerre, par la petite histoire : celle d'un journaliste américain ayant une profonde détestation des Japonais - suite à l'attaque de Pearl Harbor -, et qui va changer radicalement au contact d'un Japonais.
Il évoque deux mondes et deux hommes que la grande histoire oppose et qui, pourtant, vont apprendre à s'apprécier grâce à l'acquisition par Roderick, sous l'impulsion du Japonais Yoshihiro Takishita -Yochan -, d'une ferme traditionnelle en ruine : une minka. Le démontage puis la reconstruction de la minka dans l'ancienne cité impériale de Kamakura, va cimenter durablement et profondément leur amitié, au point que Yochan deviendra le fils spirituel de Roderick.
L'enfant dogon est une fable de voyage. Écrit à la manière d'un conte qui serait déclamé par un griot du pays dogon, sous un arbre à palabres, il raconte le fabuleux destin d'Amagana, jeune garçon qui a grandi dans la brousse avant d'être adopté par une famille d'accueil, dans le village de Songho, au Mali.
Son passage à l'âge adulte se fait lors d'une cérémonie de circoncision où il est désigné par la fille du roi qui le choisit comme prétendant, alors même que sa condition sociale lui interdit ce choix. Un amour impossible qui mènera à une tragédie, car le fils du roi Karembé ne l'entend pas de cette façon.
Rivalité, traîtrise, courage et magie sont les arrière-plans de ce récit où le décor d'une Afrique majestueuse et l'érudition de l'auteur composent une fable sensible.
Les lettres de ton enfance passée en France et en Extrême-Orient sont les témoins de tes exils successifs, notamment pour fuir la guerre. Métis vietnamien et franco-laotien, tu as été cet Indochinois aux yeux bridés, contraint d'avoir abandonné une vie confortable et aisée pour des ailleurs remplis d'incertitudes. L'adaptation et les nouveaux départs rythmèrent ainsi ta vie.
Ces lettres, inattendues, parlent d'elles-mêmes. Elles m'ont pourtant amenée à ajouter ma propre voix, mes propres mots, comme un écho à ton histoire, imaginant ce long récit dont tu es devenu le personnage principal, à ton insu. Il y est question de déracinement, le tien en l'occurrence, qui se raconte à travers l'ordinaire d'un quotidien rempli de priorités concrètes et de petites victoires infimes.
"Il est des mots qui ont une résonance particulière, comme une incantation, ils viennent vous pénétrer, font résonner des odeurs, des images, des goûts, des sons. Ils viennent stimuler un nerf, irriguer une veine, qui vous donne envie de bondir, de vous mettre en route, de ne pas manquer de courage ; comme une piqûre de rêves, ils insufflent une envie de vibrer, de hurler, de courir humer l'air ou d'attraper un nuage...
"Expédition", "Grand Nord", "boréale", "steppes", "sauvage", "Mongolie" font partie de ces mots qui peuvent animer toute une vie". Dans la cartographie intime de l'auteur, cavalière passionnée et engagée, la Mongolie occupe une place à part. Travaillant sur la question du rapport des peuples autochtones à la nature, elle s'est rendue à plusieurs reprises dans ce territoire. Accompagnée d'une amie et d'une traductrice, elle est allée à la rencontre des hommes et des femmes qui, sans renier la modernité, ont fait de l'immensité des steppes, à côtoyer la nature au plus près, un choix de vie éthique et culturel.
"J'ai perdu la photo. La seule photo que j'aie jamais faite que je trouvais vraiment belle. Perdu. Mais je m'en souviens très bien. Je suis derrière Shirin, elle marche au devant d'un paysage immense. La poussière voile les reliefs, la lumière est pourtant intense, la montagne erodée, et le foulard de Shirin tombé sur ses épaules, elle a les bras légèrement ouverts, les paumes aussi, la tête renversée.
Elle avance contre le vent. Je prends la photo que je perdrai plus tard. C'est l'été aux alentours de Téhéran. Shirin a 22 ans. Selon le terme en usage ici, c'est une enfant de la Révolution. Elle est née en 1979. Son frère, Fereydoun, est né 4 ans plus tard, un enfant de la guerre. Je suis née entre eux. Ailleurs. En Occident. Shirin de la Révolution et Fereydoun de la guerre, je les ai regardés, reçus, visités, perdus, retrouvés.
Aimés. Nos enfances menées parallèlement ont ébranlé ma trajectoire. Nous sommes cousins". Regard sensible posé sur l'Iran intime, celui où se mêlent les histoires d'adolescentes amoureuses et où la vie avance en dépit des vents parfois hostiles, cette Paupière du jour est le récit littéraire d'un voyage dans la vie quotidienne iranienne et dans cette part de famille de l'auteur, qui vivait sur des terres à mi-chemin de la réalité et de la légende.
David Labarre naît atteint d'une irréversible déficience visuelle. Ce handicap rend son enfance difficile : brimades de son père, harcèlement de ses camarades de classe, difficultés scolaires. L'école ne l'intéresse pas. La seule chose qui le motive, c'est le foot.
Il parvient à créer une division de cécifoot à Toulouse :
Un premier rêve qui se réalise et qu'il poursuivra en enchaînant les victoires jusqu'aux jeux paralympiques de Londres.
David Labarre s'essaie ensuite à l'alpinisme. Il y prend goût, l'altitude le grise ; il entame l'ascension des plus hautes montagnes françaises. Il parvient à vaincre le Mont-Blanc. Prochainement, il a décidé de s'attaquer au Toubkal, au Maroc, puis à l'Everest.
Cet ouvrage propose la biographie inspirante d'une destinée hors-norme.
Parcourant 60 ans d'immigration turque en France, Les voyageurs solitaires est un ouvrage de mémoire pour comprendre cette présence turque, souvent considérée "invisible", et en partie installée sur la rive droite bordelaise et dans certains territoires de la Dordogne. Il revient sur les raisons qui ont contraint ou pas de nombreux hommes turcs, puis leurs familles, à l'exil.
Quel regard ces Turcs d'Aquitaine portent-ils sur leur parcours ? Une trentaine de portraits, comme autant d'itinéraires de vies déracinées, sont présentés dans cet ouvrage mémoriel. Une longue introduction d'une spécialiste du sujet, Riva Kastoryano (directrice de recherche au CNRS et chercheuse à Sciences Po), donne un cadre pour saisir l'histoire de cette immigration, ses raisons, son contexte et ses apports.
«Des touristes venus passer 15 jours au Japon m'ont dit avoir été enchanté par la gentillesse nationale et la serviabilité des Japonais ; mais beaucoup se posaient la question de savoir si la gentillesse légendaire des Japonais était innée ou si elle était le produit d'une programmation...
Je suis la première à apprécier tout ce qui rend la vie si plaisante au Japon : le sens du travail bien fait, le désir de faire toujours mieux, et je ne parle pas de la sécurité inégalable, ni des services.
Il est difficile - voire impossible - de théoriser sur un pays dont la définition semble être :
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?» De fait, ces chroniques immergent le lecteur dans un continent autre, là où logique et culture occidentales sont désorientées.
A la recherche de la Patagonie est un récit de voyage sur la route, effectuée en stop, de Mendoza jusque l'extrême sud de la Patagonie. Il évoque davantage les rencontres en chemin, plutôt que la nature sauvage.
Sur la ruta 40 et les pistes secondaires, les rencontres avec la nature et les hommes ébranlent les certitudes et instillent le doute. Est-on bien dans ce grandiose décor que d'aucuns louent comme une terre rêvée parce que désertée par les hommes ?
Et pourtant, des hommes et femmes ont adopté ce territoire de l'extrême, mais ils ne sont pas toujours ceux que l'on croit. Reste alors à avaler les kilomètres, faire l'expérience du voyage à la rencontre de l'imprévu, et se fondre dans l'âpreté des éléments qui se jouent du voyageur, pour voir, par soi-même, ce que cache ce territoire.
"La cabane est un prétexte. Au même titre que le vélo est le parfait alibi pour rencontrer l'autre, la cabane l'est pour se (re)découvrir. Cependant, ces questions me taraudent : trouverai-je un intérêt dans cette nouvelle expérience ? Chaque jour apportera-t-il son lot de découvertes, de surprises, d'émotions ? Serai-je capable de déceler la beauté dans l'immobilité, celle-là même que le mouvement permet de révéler ? Car distillée avec parcimonie et renouvelée en permanence lors d'un avancement géographique, elle est source intarissable d'inspiration et piège à routine.
Je me doute que même à l'arrêt, cette beauté éphémère qui enivre l'être de passage est persistante pour qui sait l'apprécier. Mais avec une vitesse de déplacement nulle, l'ennui ne guettera-t-il pas, un mois au même endroit ? " Dans sa cabane flottante, au milieu d'une zone humide de la lointaine Bornéo, en Indonésie, Nicolas Ternisien entreprend de se confronter à cet autre redouté : la solitude.
Reclus sur l'eau, il n'a plus qu'à observer cet angle lacustre du monde, en attendant qu'il s'y passe suffisamment de choses pour éveiller sa curiosité, mais point trop qui auraient pour conséquence de troubler cet ermitage choisi et la rencontre avec soi.
C'est un voyage en nostalgie sudiste. Le voyage de l'homme d'òc, la nostalgie des sud éternels. Ni idéalisée, ni honteuse, triste ou gaie, confiante ou amère, au pluriel ou au singulier, mais forcément subjective. Là se bousculent les souvenirs et les rêveries d'un contemporain, peut-être solitaire, mais qui n'est pas né de rien ni de nulle part. Un contemporain d'autant plus ouvert qu'il est enraciné.
Dans ses balades et flâneries, dans l'âme des chemins creux, au gré des intimités rurales, des cultures plus urbaines ou de l'histoire d'une terre, le présent et le passé s'étreignent et les plaisirs et les émotions façonnent la conscience humaine. Dans ce monologue fragmenté comme autant de sentiers qui racontent la vie d'ici, l'homme d'òc évoque la langue, l'identité, la société d'aujourd'hui, Bacchus, les frontières et les clochers, l'Europe latine de Mistral ou les troubadours ; loin de la quête obsessionnelle de la nouveauté et de la dégradante obligation d'être de son temps, il va au rythme de son pas lourd, par delà les chemins creux.
Trois roues, trois amis, cent vingt jours, vingt mille kilomètres et seize pays traversés ; les données chiffrées de L'Odyssée électrique augurent une aventure pleine de rebondissements. Fraîchement sortis de leurs études, les comparses Karen, Ludwig et Rémy entreprennent une chevauchée singulière : relier en quatre mois la capitale de la Thaïlande à Lourdes, en tuktuk électrique. Baptisé «The Pilgreens», le projet a pour ambition de mettre la jeunesse à l'épreuve en se mobilisant autour des enjeux climatiques avec abnégation face aux difficultés, mais aussi de promouvoir le réel potentiel de la mobilité électrique. Le récit de cette traversée est un éloge de l'aventure, avec ses soubresauts, ses déboires et ses interrogations liées au défi technologique.
Dans les années 1980, Armelle Faure, étudiante en anthropologie, découvre avec enthousiasme la Haute-Volta, pays à l'aube d'un grand changement sociétal, qui deviendra son «terrain» pour sa thèse d'ethnologue.
Vivant dans un village bisa, plongée en plein coeur de la révolution burkinabé menée par Thomas Sankara, l'auteur découvre un pays empli de mysticisme et de traditions séculaires. Les événements révolutionnaires se multiplient, le doute s'installe, mais le changement aura bien lieu, y compris dans le hameau bissa : c'est la naissance du « pays des hommes intègres ».
Affinant son regard sur la société africaine et sur le rapport à l'Occident, à ce moment charnière de l'histoire burkinabé, Armelle Faure évoque ces années à côtoyer l'Afrique au coeur, enthousiaste et pétrie d'espoir.
Cet ouvrage est un récit autobiographique inédit qui nous renseigne sur les circonstances de l'assassinat du père de la révolution burkinabée :
Thomas Sankara. Il est écrit par Daniel Tranchant qui fut médecin à Ouagadougou et qui soigna le père de Thomas Sankara.
Le livre ne déroge nullement au secret médical mais donne un nouvel éclairage sur cet épisode tragique de l'histoire du Burkina Faso.
Quelques semaines avant son assassinat, le jeune révolutionnaire Sankara s'entretient avec le médecin. Il lui fait alors part d'une décision surprenante, qui sera à l'origine d'une manoeuvre des opposants pour lui retirer le pouvoir...
Journal d'un océanographe, sur le rebord du monde, est un ouvrage qui regroupe une trentaine de courts récits tirés d'expériences que vécut Paul Tréguer, océanographe de renom, tout au long de ses aventures scientifiques sur les mers du globe.
La mer, en ses rêves et ses drames, a toujours bercé l'enfance de l'auteur. Très tôt, l'océan aimante le scientifique qui voit en cette immensité une richesse à étudier et à préserver. Il entre donc dans le monde des marins, dans la sillage du commandant Cousteau, avec l'ardent désir de comprendre ce qui se joue sous la surface des océans.
Trente ans durant, il mène une vie d'aventure, à la rencontre de toutes les richesses des mers, côtoyant la communauté des marins et les peuples lors de ses multiples escales.
Avec ce cinquième ouvrage consacré à l'Asie, Jean-Pierre Poinas signe l'un des rares récits français de voyage en Indonésie. Après trois mois d'une errance hasardeuse et savante sur l'île de Java, l'auteur donne à sa narration le charme d'un roman peuplé de figures attachantes : paysans, héritiers des petits royaumes, chamans, étudiantes musulmanes, agronomes visionnaires, écrivains, conteurs, imams, chanteurs de heavy metal... Ces souvenirs du centre du monde nous accompagnent à la découverte de cette étonnante civilisation. S'y révèlent des secrets invraisemblables, jusqu'au moment d'ivresse où nous renonçons à l'incrédulité, qui nous est pourtant si chère : pour un peu, l'invisible nous serait accessible... Une jubilation magique.
«Après être parti en quête de canards en plastique disparus au Groenland, j'ai mené une autre aventure, plus intime cette fois. Atteint d'une maladie auto-immune qui me fait boiter comme mon grand-père maternel, un Landais pur souche, j'ai voulu guérir. Cette maladie remonte à très loin : elle niche au plus profond des cellules, dit la science qui s'arrête là. Tout ce qui vient du plus profond vient de l'enfance et des aïeux, ai-je poursuivi.
Pour comprendre ce qui m'arrive, je suis donc allé en enfance, dans les Landes, où, à travers plus de 200 sources, l'eau sacrée coule en abondance. J'ai suivi, en vélo, le fil de l'eau des fontaines miraculeuses. J'ai dormi à proximité des sources, au coeur de la forêt, et au contact de l'eau, de l'air, de la terre, à la rencontre du monde invisible."
C'est à un voyage érudit et pétri des ombres des grands explorateurs que nous convie l'auteur François Claerhout, insatiable voyageur et fin connaisseur de l'Afrique subsaharienne. Des caravanes du sel de la région de Dalol, assommée par des températures extrêmes, jusqu'au territoire de l'Omo et ses vallées verdoyantes, en passant par les églises souterraines de Lalibela ou les mythiques cité d'Addis Abeba et d'Harar, l'Éthiopie est une terre de paysages bibliques.
Ses portes s'ouvrent aujourd'hui aux voyageurs soucieux de fouler une région singulière du monde où débute la grande histoire de ses premiers hommes.
De l'Abyssinie à l'Éthiopie et de Lucy à Henri de Monfreid, l'auteur évoque ici l'un des territoires les plus chargés par l'empreinte et l'imaginaire de notre civilisation.
En 2008, la NASA lâche 90 canards en plastique dans un glacier au Groenland, pour étudier sa vitesse d'écoulement. Depuis, aucune nouvelle. Les coincoins ont disparu.
Sébastien Laurier, auteur et comédien, a décidé de partir à leur recherche et d'enquêter sur place, une première fois en 2011, puis en 2018.
Alors même que ses recherches le conduisent en des lieux improbables, son journal de bord révèle toutes les fractures de la société groenlandaise qui trouve difficilement sa place dans la colonisation économique s'immisçant toujours plus dans le pays.
Entre les moments de doutes sur cette expédition utopique et le rêve de voir s'animer la vie en harmonie avec cet environnement hostile, ce récit d'un chemin sans fin nous fait découvrir la face immergée de ce territoire glacé.
Octobre 1816.
Après une rupture amoureuse, Alban, âgé de dix-sept ans, décide brusquement de quitter sa famille et son métier de batelier pour le grand large. C'est le Bordelais, en partance pour un voyage de trois ans, qui l'accueille à son bord.
Quand le trois mâts met l'ancre dans la baie de Taiohae, aux Marquises, le jeune mousse est ébloui par la rencontre avec une civilisation dont les valeurs sont aux antipodes de la sienne.
Dans les tribus de l'île de Nuku Hiva, la vie insouciante, sous la protection du peuple des dieux, est inchangée de mémoire d'homme. Les guerriers coupent le bois de santal alors que leurs sensuelles vehines s'affairent au quotidien.
Mais, le temps de cette escale, chacun prend peu à peu conscience des bouleversements dont ce nouveau contact est annonciateur.
Je n'avais pas seize ans. Mes copines adoraient Gilbert Bécaud et moi Luis Mariano. Sur un mur de ma chambre, étaient punaisés, photos, coupures de presse, Haroun Tazieff ou Fidel Castro. Avec le premier, mes parents m'ont refusé l'autorisation d'une expédition à l'Etna. Avec le second, l'épopée des guérilleros de la Sierra Maestra a enthousiasmé ma vie, nourri mon romantisme adolescent puis mes engagements adultes.
Je ne savais pas que j'étais déjà allée à Cuba. Je ne savais pas non plus que j'y reviendrais, souvent. J'ignorais aussi que j'enseignerais un jour pour faire aimer la part latino-américaine de ma culture, que les volcans continueraient à soulever en moi une émotion sans fin et que le journalisme serait, finalement, mon métier et La Havane mon premier poste, mon baptême du feu.